La liste des auteurs retenus pour le prix Man-Asia vient d’être publiée. Dix écrivains pour un prix qui sera attribué en mars 2011. Les règles ont évolué: il doit s’agir d’auteurs asiatiques et d’ouvrages publiés ou traduits en Anglais, alors qu’auparavant, la présélection était beaucoup plus large (vingt cinq ouvrages) et concernait des ouvrages non encore publiés.
Au cours des trois dernières années, des écrivains chinois ont remporté deux fois le prix : « Le Totem du Loup » de Jiang Rong en 2007 et Su Tong en 2009 avec « The Boat to Redemption », un excellent roman dont on parlera quand sera publiée la traduction française. En 2008, Yu Hua , finaliste avec « Brothers » avait vu le prix lui échapper.
Cette année, la sélection inclut Bi Feiyu pour « Trois Sœurs » (1) qui n’est pas son meilleur roman. Mais il y a un point commun entre ces trois romans chinois: leur traducteur est Howard Goldblatt, un professeur américain très connu qui semble avoir lancé une OPA sur le prix Man-Asia… !
Une bonne nouvelle : l’un des trois membres du jury est Hsu-Ming Teo, une jeune femme née en 1970 en Malaisie et qui émigra en Australie avec sa famille en 1977. Elle est professeur à l’Université Macquarie de Sydney en Histoire et en Littérature. En 2000, elle publie un roman tout à fait remarquable « Love and Vertigo » (2) qui obtint le prix australien Vogel décerné aux romans de jeunes écrivains, leur permettant d’être publiés.
Ce livre se déroule dans trois cadres différents: la Malaisie au moment du 13 mai 1969 et des meurtrières émeutes anti-chinoises, à Singapour où l’auteur fait revivre la vie de sa mère pendant l’occupation japonaise et en Australie où la famille tente avec difficulté de s’intégrer. C’est aussi un texte sur le legs colonial des Britanniques qui conduit les jeunes Chinois, ayant reçu une éducation anglaise, à mépriser leurs racines sino-malaisiennes et à valoriser une culture britannique irréelle, celle des livres d’Enid Blyton ! Assimilation, multiculturalisme, racisme des récents immigrés, des thèmes qui ne sont pas seulement propres à l’Australie !
J’ai moins aimé son deuxième roman : « Behind the moon », publié par le même éditeur en 2005; un roman sur la recherche de l’identité. Une jeune réfugiée du Vietnam, née d’un père soldat, noir et Américain , et d’une mère vietnamienne, essaie de trouver un équilibre avec deux garçons (dont l’un est perturbé par son homosexualité) et sa mère qui va encore compliquer leurs relations.
Espérons que la participation à ce jury donnera à Hsu-Ming Teo l’envie à nouveau d’écrire…
Bertrand Mialaret
(1) Traduit en Français par Claude Payen et publié par P. Picquier en 2004.
(2) « Love and Vertigo ». Allen and Unwin; 2000.