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Les enfants sont-ils un handicap littéraire?

novembre 10, 20101 CommentNouvellesBy Bertrand Mialaret

Comme dit Lu Xun : « Marx a quand même réussi à écrire « Le Capital » au milieu des pleurs des enfants, donc c’était un grand homme… »(1). Cette phrase m’est revenue à l’esprit en lisant les essais de Feng Zikai (2) sur lesquels je reviendrai bientôt et m’a rappelé que ce groupe d’amis de la région de Shanghaï : Feng Zikai, Zhou Ziqing et Ye Shengtao avaient tous écrit sur les enfants autour de 1925, tout comme Lu Xun et un écrivain du Nord, Lao She.

Un mur de lamentations :

A cette époque, les enfants deviennent un sujet en littérature pour les écrivains de la génération du 4 Mai 1919. Zhou Ziqing (1898-1948), un des grands stylistes de cette époque, devenu un classique pour ses textes en prose (sanwen) écrits en langue populaire (baihua) (3), nous décrit la vente d’une petite orpheline :  « on a acheté ta vie pour sept maos, pauvre enfant ! La vie humaine est-elle d’un prix si bas ? Alors je me suis mis à penser au destin de mes enfants et j’en ai été terrifié » (1924).

De même si l’éducation et sa réforme est un sujet essentiel de débats, les intellectuels tel Lu Xun et son frère Zhou Zuoren, regrettent que la Chine n’ait pas de véritable littérature pour enfants. Enseignant et écrivain, Ye Shengtao (1894-1988) va commencer à écrire et à publier les premiers contes de fées.

Mais pour ces écrivains, leurs enfants sont cependant source de tourment; comme dit Lao She dans un essai plus tardif (1936)(4) : « ce sont surtout les enfants qui rendent la famille pénible. Sans parler de l’argent qu’il faut dépenser pour les élever; leurs espiègleries, leurs pleurs et leur agitation suffisent à me faire perdre la raison ».

Pour Zhu Ziqing, c’est bien pire; « chez nous, c’est toute la journée un vrai champ de bataille…j’écrivais alors une lettre à Shengtao, je lui disais que le tourment que mes enfants m’infligeaient et la situation étant sans issue, j’en étais venu à me demander- c’est à peine croyable- si je ne ferai pas mieux de me suicider… ». Il ne le fit pas mais cela ne l’arrêta pas ; six enfants avec sa première femme et trois avec la seconde !

« Un ménage heureux » vu par Lu Xun en 1924 :

Il écrit une nouvelle sur un personnage qui ne parvient pas à écrire une nouvelle. Son héros écrit sur un couple d’intellectuels de salon qui vit sans souci matériel et avec le « snobisme » des références occidentales, alors que le héros est confronté aux tracas que lui causent la vie quotidienne et ses enfants.

Le ton de Lu Xun est mordant presque grinçant et ramène le lecteur à la réalité des injustices. Zu Ziqing et Feng Zikai n’ont pas vraiment cette insertion dans la vie sociale, quant à Ye Shengtao, il n’a pas le talent de Lu Xun pour la composition et la conclusion d’un texte.

Les enfants n’ont pas là le rôle de révélateur qu’ils ont chez Lao She : « lorsqu’on n’a pas d’enfants, on vit dans un monde qui n’a pas encore découvert l’Amérique. L’enfant est le Christophe Colomb qui vous conduit vers un nouveau continent… J’ai tout appris. Les enfants ont enrichi mon expérience infiniment plus qu’un diplôme universitaire ».

Lao She ira plus loin, il écrira à Singapour en 1929 un livre pour les enfants « L’anniversaire de Xiaopo »(5), puis une pièce de théâtre « Le bateau magique » (ELE 1982).

Le culte de l’enfant :

Feng Zikai avait la nostalgie de sa jeunesse dans son village natal de Shimenwan, il avait perdu l’innocence et la simplicité de l’enfance et ses propres enfants ont renforcé ce sentiment de perte.

Dans son essai « A mes enfants » (1926) , il idéalise le caractère de Zhanzhan, son petit garçon, et de ses enfants, « votre créativité est réellement supérieure à celle des grandes personnes » … « en tant que créateurs, vous n’acceptez aucune entrave de la nature ou de la société ».

Geremie Barmé , professeur à l’Université de Canberra, montre dans un ouvrage remarquable(6), les liens entre les dessins (qui ont rendu Feng Zikai célèbre) et ses essais. Feng crée dans ses dessins, une vision du monde à travers les yeux d’un enfant; il consacre même un volume de dessins au thème de l’enfance. Des dessins qu’on n’oublie pas: l’enfant dans les bras de sa mère qui tend ses mains vers la lune: « je la veux ! » ; la bicyclette de Zhanzhan, son fils, dont les roues sont des feuilles de lotus.

Pour Feng, les enfants ne sont pas une continuation des parents, ils appartiennent à un monde totalement différent. Son intérêt se limite à ses propres enfants et décline rapidement quand ils deviennent plus âgés; la relation la plus raisonnable avec eux est alors celle de l’amitié.

Tout ceci est bien loin des luttes sociales et les amis de Lu Xun le lui rappelleront tout comme les attaques qu’il subira pendant la Révolution Culturelle.

Bertrand Mialaret

(1)   « Errances » par Lu Xun, traduit et présenté par Sébastian Veg. Editions de la Rue d’Ulm. 2004.

(2)   « Couleur de Nuage » par Feng Zikai, traduit et présenté par Marie Laureillard-Wendland. Bleu de Chine. Gallimard. 2010.

(3)   « Traces » par Zhu Ziqing, traduit par Lise Schmitt. Bleu de Chine. 1998.

(4)    « Ecrits de la Maison des rats » par Lao She. Traduit par Claude Payen. P. Picquier 2010.

(5)    « L’anniversaire de Xiaopo » par Lao She, traduit par Claude Payen. You Feng 1999 (avec en couverture un dessin de Feng Zikai !).

« An artistic exile: a life of Feng Zikai » par Geremie Barmé. University of California Press 2002.

Feng Zikai
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Bertrand Mialaret

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